A PROPOS DU « CHAUDRON FRANÇAIS »

Publié le par mraplunellois

La présentation par l'hebdomadaire "Le Point" du livre consacré à Lunel « Le chaudron français » avait fait craindre le pire. (Voir l'article précédent) Lecture désormais faite, il faut reconnaitre qu’il offre au contraire un matériau intéressant, si on veut bien s’en servir pour avancer.

Il plante parfaitement le décor d’une ambiance locale, qui en 1983 avait conduit à la création de notre association, Mrap Lunellois, et à la réalisation du film qu’il cite « Bienvenue à Lunel /Enquête sur une rumeur. » Dans son interview donnée au Midi Libre, le co-auteur Décugis évoque même un «  apartheid social, ethnique, racial». Il parle clairement de racisme, celui que nous avions dû également nommer en 2011, en relançant notre association qui s’était un temps essoufflée.

 

Il retrouve en fait les deux axes relevés par Kepel  dans "Terreur dans l'Hexagone" et les illustre parfaitement.

Il suit la montée du phénomène de radicalisation, nationalement et localement, les actes et motivations des djihadistes, les réactions de leur environnement familial et religieux. On y lit les erreurs commises. Il consacre à cet ensemble les deux tiers de son livre.

Pour ce qui est du « tiraillement » que connait la ville « entre des identités culturelles exacerbées » déjà noté par Kepel, il abonde, en mettant en cause les élus successifs, et particulièrement l’équipe municipale actuelle dans un chapitre intitulé « Un mode de vie contre l’autre », formule attribuée à Monsieur Arnaud.

Il y dénonce un maire qui « apparait attaché à sa commune et à ses traditions, mais totalement déconnecté de la réalité de sa ville », qui au lieu de travailler sur ce qui peut faire société commune, au lieu de s’attacher à réduire les antagonismes, va prendre le risque de les exacerber en croyant nécessaire de seulement défendre « un mode de vie contre l’autre ».

Ceci rejoint la critique que nous avions eu l’occasion d’exprimer dans un communiqué publié dans le Midi Libre du 12/1/17 , suite à une interview donnée par le maire au même journal. Communiqué qui nous avait d’ailleurs valu des menaces ; plainte avait été déposée et nous attendons la réponse de la justice.

 

L’ouvrage « Le chaudron français » offre donc un matériau intéressant pour bien appréhender la réalité et travailler à la faire évoluer positivement.

Par contre il comporte à mon sens des manques dans plusieurs domaines.

A lire autant l’interview donnée au Midi Libre que le livre, on a l’impression que les seuls acteurs de la ville sont des politiques, et on a donc une ville qui ne sait pas réagir. C’est bien sur totalement faux. Dès les années 80, la situation a été dénoncée par des associations, dont la notre. Des signaux d’alerte ont été régulièrement lancés. Des actions ont été menées. Les effets ont été insuffisants, mais les efforts n’ont pas été vains. Cet oubli de ceux qui travaillent à tisser des liens est d’autant plus regrettable, que le tableau final s’en trouve du coup exagérément noirci et n’ouvre aucune perspective d’avenir. Un faux constat qui ne peut que profiter à ceux qui prônent des solutions simplistes et irréalistes.

 

Autre constatation : on ne parle que de Lunel ville, alors que Lunel est le centre de tout un territoire. Les djihadistes n’étaient d’ailleurs pas tous de Lunel ville. Il y a une co-responsabilité du territoire, qui n’est pas assez clairement signalée dans l’ouvrage. Pourtant, pour avancer demain, il faudra que la réponse vienne de la population de l’ensemble du territoire, de ses associations et de ses élus.

 

Autre remarque encore : rien sur les effets secondaires de cette situation : la montée du vote du front national sur le territoire et la progression de ses idées au-delà de son électorat. Effets et causes, car les deux phénomènes s’autoalimentent. Il faudrait pourtant en parler si on veut sortir de ce cercle vicieux.

 

Pour finir, le livre peut en effet n’être qu’un peu de bruit momentané. Citoyens du lunellois et associations, sachons en faire autre chose, avec l’appui des élus s’ils le veulent.

 

Jacques Vénuleth

 

PS comme précisé sur les autres articles, ce texte n’est qu’une invite à commenter ou à donner vos analyses propres en allant au bas de page.

 

Publié dans DEBAT, LECTURES

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P
Ce livre n'a d'intérêt que s'il est mis en perspective sinon ce n'est qu'une histoire Pescaluno-Lunelloise qui conforte chaque "camp" et fige le fossé qui les sépare.<br /> il fait écho aux ouvrages de Christophe Guilluy, à la question de ce qu'il nomme "l'insécurité culturelle", et renvoi à la peur du déclassement. Vrai sujet à traiter.
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